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Général BERTRAND, LE FIDèLE COMPAGNON

Son nom ne vous dit peut-être rien. Il n'était pas maréchal, n'avait pas de surnom particulier, n'est pas mort lors d'une charge héroïque, et pourtant, il n'en reste pas moins un personnage important.


Laissez moi donc vous narrer l'histoire de Henri-Gatien Bertrand, général d'Empire ...



IL CONNAÎT PAS RAOuL !


Alors, non, je ne parle pas du personnage de l'immense Bernard Blier dans le tout autant immense "Les Tontons Flingueurs", mais du château du même nom. Oui oui, Château Raoul, à Châteauroux, c'est là où est né le petit Henri-Gatien Bertrand. Il s'agissait du logement de fonction de son père, Henry, qui était maître particulier des eaux et forêts et subdélégué de l'intendance de Bourges au département de Châteauroux. D'ailleurs, soit dit en passant : Château Raoul / Châteauroux, vous saisissez ? Bah oui, le nom actuel de la ville vient de celui du château en fait.

Raoul, dans son château, mais pas pareil

Mais revenons à nos moutons. Nous sommes le dimanche 28 mars 1773 et, plutôt que de se la couler douce en ce frais week-end d'Indre, Henriette (née Boucher), met au monde son fils, Henri-Gatien. Cette dernière était, notons-le, même si ça ne sert pas à grand chose de le savoir, la fille d'un inspecteur général des Ponts et Chaussées.


Si on ne connaît pas en détail la jeunesse d'Henri, on sait qu'il a été élève chez les pères de la Doctrine Chrétienne, au Collège Royal de La Flèche, dans la Sarthe. Etablissement qui avait auparavant accueilli René Descartes, d'ailleurs. Il est intéressant de savoir que Descartes avait fait un court passage à l'infirmerie de ce collège et c'est là qu'il aurait sorti sa phrase célèbre, en soignant l'écorchure qu'un camarade s'était faite dans la cour : "je panse, donc j'essuie". Eh oui, c'est depuis ce jour là que l'on sait qu'il faut toujours nettoyer une plaie avant d'appliquer un bandage. Merci René pour ce conseil avisé.


"Et paf" - René Descartes après avoir utilisé sa citation bien connue pour la première fois

ENGAGEZ-vOuS Qu'ILS DISAIENT !


Et c'est ce que fait Henri-Gatien à pile poil 20 ans, le 11 septembre 1793. Et il ne fait pas ça n'importe comment, non. Il entre comme sous-lieutenant à l'Ecole Royale du Génie, à Mézières et en ressort major de promo, paf.


Lieutenant quelques temps plus tard, il est promu capitaine le 21 mars 1795, mais ne se contente pas de ça et, pendant 1 an, remplace, Gaspard Monge (l'illustre mathématicien et homme politique) à la chaire de stéréotomie (qui est l'art de la découpe et de l'assemblage des pierres et de la menuiserie en architecture), ainsi qu'en géométrie descriptive (essentielle dans les plans et dessins techniques), à l'Ecole Polytechnique. Oui, on peut dire que les maths, c'est un tout petit peu son truc à Henri. Rappelons le, il a seulement 22 ans et sa carrière ne fait que commencer !


Pour le logo X, Elon Musk n'a rien inventé ...

Il sert durant la guerre des Pyrénées, en 95/96, puis fait partie, en 1797, de l'ambassade envoyée à Constantinople, en tant qu'attaché à la mission du Général Aubert du Bayet. Alors, le but est sympa, puisqu'il consiste à aider les Turcs à organiser la défense des Dardanelles. Ouais, mais bon, les Ottomans, ils n'ont rien demandé, alors, malgré un périple difficile, les Français se font rembarrer et renvoyer à la maison ... Bon, tant pis. Bertrand, lui, rejoint l'armée d'Italie. Et c'est là qu'il rencontrera ... devinez qui ? Ben oui, évidemment ! Bonaparte !


Bonaparte et Bertrand, BEST BuDDIES


Enfin, "meilleurs potes", pas tout à fait, mais ils s'entendent bien. Henri-Gatien s'illustre lors de la Bataille des Pyramides et se voit promu chef de bataillon et nommé sous-directeur des fortifications.


Le 25 juillet 1799, à Aboukir, son cheval est tué sous lui et lui-même est blessé (légèrement) à la tête. Bonaparte fait alors appel à lui pour remplacer son chef de brigade. Bertrand, pas du genre à se faire porter pâle pour une "simple" blessure au crâne, s'élance à l'assaut du fort d'Aboukir ! Là, il prendra un drapeau et sera blessé à la cuisse. Cet acte de bravoure lui vaudra une promotion en tant que chef de brigade.

Un peu plus d'un an plus tard, en septembre 1800, il devient général de brigade avant d'assumer également, 6 mois après environ, la charge de directeur des fortifications d'Alexandrie.


Napoléon, alors Empereur, en fait son aide de camp, le 7 mars 1805.


A partir de là, il participera, aux côtés de l'Empereur, à toutes les grandes batailles impériales ! Austerlitz, Iéna (où il obtient la capitulation de Spandau), Eylau, ou encore le siège de Dantzig.


Le 30 mai 1807, il est fait général de division, puis, en mars 1808, devient comte de l'Empire.


C'est très régulier, hein !


Mais bon, la carrière c'est bien, mais et l'amour alors ? C'est donc à 35 ans bien sonnés qu'il épouse Elisabeth-Françoise Dillon, surnommée Fanny, le 16 septembre 1808. Cette jeune-femme de 23 ans est petite-petite cousine par sa mère, de l'impératrice Joséphine. Une autre parente illustre d'Elisabeth n'est autre que Hortense de Beauharnais, chez qui se déroulera le mariage religieux.


Pas cette Fanny là

Pas moins de 6 enfants naîtront de cette union ! Et parmi leurs prénoms, vous reconnaîtrez certaines références ... Napoléon, Hortense-Eugénie, Henri, Alexandre, Arthur et Alphonse.


Entretemps, Bertrand rejoint l'Espagne, puis construit les ponts sur le Danube qui furent vitaux dans la victoire de Wagram. Le 14 août 1809, il est fait grand aigle de la Légion d'honneur et, 2 ans plus tard, succède à Marmont en tant que gouverneur général des Provinces Illyriennes (un bout de l'Italie du nord d'aujourd'hui).


Bon, là, c'est pas un grand succès. Peu habitué à ce rôle, Bertrand hésite à prendre des décisions, c'est finalement pas son truc ...


A contrecœur, Napoléon lui retire ses fonctions mais lui donne le commandement du IVe corps de la Grande Armée. Hum, là non plus, ça ne se passe pas super bien, puisque ses troupes sont battues devant Wartenburg le 3 octobre 1813, par Blücher et Yorck.


Allez, passons là-dessus. 1 mois et demi après cet échec, Bertrand est nommé grand maréchal du palais et s'installe aux Tuileries avec sa petite famille.


L'EMPIRE EST PASSé


Lors du premier exil de l'Empereur, sur l'Île d'Elbe, Bertrand le suit, bien évidemment. Il y exerce les fonctions de ministre de l'intérieur et gouverneur des affaires civiles.


C'était pas une super ambiance ...

Son épouse le rejoint et c'est là que naît le petit Alexandre, qui, malheureusement, décèdera quelques mois plus tard.


Pendant les Cent-Jours, il reprend sa place aux Tuileries et devient, par la même occasion, le conseiller militaire de Napoléon.


Mais, on le sait, ça ne durera pas et, après Waterloo, il suit l'Empereur à la Malmaison et obtient de ce dernier l'autorisation de le suivre en exil.

C'est Bertrand qui prendra note de la lettre dictée par Napoléon dans laquelle il demande au Prince Régent de lui accorder l'asile en Grande-Bretagne. Nous sommes le 13 juillet 1815.


Evidemment, cette demande ne sera pas exaucée et Bertrand suivra l'Empereur jusqu'à Sainte Hélène où il s'installera avec sa famille, à l'une des extrémités du terrain de Longwood où réside désormais Napoléon.


Napoléon lui dictera ses mémoires des "Lettres du Cap" et de "La Campagne d'Egypte". Mais, alors que la santé de son épouse décline et que son 5e enfant vient au monde, Bertrand demande à l'Empereur l'autorisation de rentrer en France, ce qu'il lui refusera.


A côté de celles de Napoléon, les dictées de Pivot, c'est du pipi de chat !

En 1816, il écrit une lettre secrète au duc de Fitz-James dans laquelle il déclare qu'il "reste sujet du Roi et je serai son sujet fidèle". Il y promet de quitter Napoléon en échange d'un retour en France avec sa famille. Pour cette missive, il sera condamné à mort par contumace pour, accrochez-vous : trahison envers le Roi Louis XVIII !


Ce n'est qu'après le décès de l'Empereur que Bertrand revient à Paris, nous sommes en octobre 1821. Il fut amnistié de sa condamnation.


L'APRèS NAPOLéON


Pendant plusieurs années, il navigue entre ses terres de Laloeuf, dans l'Indre et son hôtel parisien de la rue de la Victoire et ne fait plus de vagues.


La monarchie de Juillet le fait recteur de Polytechnique en 1830 et il est également élu député de l'Indre (il siège à gauche). Mais, en 1834, il est battu aux élections et, comme l'avait déclaré Lionel Jospin à l'époque, il assume pleinement la responsabilité de cet échec en se retirant de la vie politique (et publique).


C'est en mars 1836 que son épouse succombe à un cancer du sein et, pour ne pas arranger les choses, il a pas mal de soucis avec ses deux fils aînés. Et là, Bertrand en a ma claque. Il se barre en Martinique ! Et ça durera 3 ans. Il y portera le titre de gouverneur. Il gérera surtout les plantations de canne à sucre léguées par sa belle-mère (enfin, ce sont surtout ses 250 esclaves qui se chargeront du boulot, n'est-ce pas ?).


En 1840, il revient en France et, sûrement histoire de se faire bien voir par Louis-Philippe, il lui remet l'épée de l'Empereur. Bon là, ça clashe pas mal avec la famille Bonaparte, qui lui réclamait l'objet depuis un moment et que Napoléon leur avait officiellement léguée ...


Mais bon, il se rattrape un peu en faisant partie de l'expédition partie le 7 juillet et destinée à ramener la dépouille de l'Empereur. Son fils, Arthur, s'embarque avec lui sur la Belle Poule et écrira ce périple dans un ouvrage intitulé "Lettres sur l'expédition de Sainte-Hélène en 1840". Ouais, pour les titres, il aurait pu faire preuve d'un peu plus d'imagination ou de poésie, mais bon, ça assoit le truc, on sait de quoi ça parle du coup, pas de surprise !

Le retour triomphal des "cendres" de Napoléon

En automne 1842, le voilà de retour en Martinique, où il reste quelques mois avant de faire un petit tour des Caraïbes.


De juillet à novembre 1843, il parcourt, du sud au nord-est, les tout nouveaux Etats-Unis d'Amérique. Si les Anglais n'avaient pas failli à leur parole, c'est avec Bonaparte qu'il aurait pu faire ce périple. Il y est très bien accueilli et y rencontre bon nombre de grandes figures de l'époque.


A la fin de l'année, il rentre en France, mais il sera victime d'un refroidissement qui lui sera fatal. A 70 ans, le 31 janvier 1844, Henri-Gatien Bertrand s'éteint à Châteauroux.


Ce n'est que 3 ans plus tard, le 5 mai 1847, que sa dépouille sera ramenée à Paris et sera inhumée aux Invalides, à gauche derrière le maître-autel du Dôme.


La sépulture de Bertrand aux Invalides

Cette même année paraîtront, via ses fils, les "Campagnes d'Egypte et de Syrie", dictées par Napoléon. On doit également à Bertrand les 3 volumes des "Cahiers de Sainte-Hélène" relatant les moindres faits et gestes de l'Empereur en exil.


Henri-Gatien Bertrand n'était sans doute pas un gars parfait, ni un héros ultime et dévoué jusqu'à la mort, mais son parcours et sa fidélité à l'Empereur méritaient que l'on s'y attarde un tout petit peu.


A la prochaine fois pour ... un truc sur ... quelqu'un ou quelque chose, on verra bien !


Castelroussinement vôtre,


Votre humble et dévoué serviteur,





- ODY






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